Les super pouvoirs du Tardigrade bientôt à notre portée
Ne vous fiez ni à sa taille lilliputienne ni à son corps replet, le tardigrade est l’espèce animale la plus résistante sur Terre.
Ses capacités hors norme font l’objet de nombreuses recherches.
L’ambition des scientifiques? Percer ses secrets de robustesse pour, peut-être, les appliquer à l’Homme.
Inutile de chercher un tardigrade dans votre jardin, la bestiole est invisible à l’œil nu. Et pourtant le tardigrade collectionne les records :
Cette capacité unique de survie, il la tient d’un processus de dormance bien particulier qui se déclenche lorsque son organisme détecte des conditions de vie défavorables.
Comme une mise sur pause, la cryptobiose permet au tardigrade de patienter jusqu’à ce que son environnement soit à nouveau propice à la vie.
Elle se déclenche grâce à un indicateur, la cystéine. Dès que cet acide aminé s’oxyde à cause de conditions extérieures néfastes, l’organisme sait qu’il faut entrer en cryptobiose.
Son métabolisme est réduit de près de 99% par rapport à son fonctionnement normal.
Son corps se miniaturise et perd entre 32 et 40% de son volume par élimination de la quasi-totalité de l’eau corporelle.
Certaines cellules restent quant à elles à leur taille initiale comme celles des muscles.
L’état de cryptobiose peut durer jusqu’à 30 ans. Il est réversible et peut se reproduire à l’infini.
Durant cette phase de dormance, les cellules sont protégées par un gel synthétisé par des protéines protectrices. Ce gel assure ainsi la survie de l’organisme dans des conditions anhydres (sans eau).
Des chercheurs de l’université du Wyoming ont fabriqué en laboratoire des lignées de cellules de rein humain pour qu’elles synthétisent ces protéines gélifiantes protectrices.
Leurs résultats publiés en mars 2024 sont incroyables : ces nouvelles cellules synthétisent elles-aussi ce gel protecteur lors d’un stress hydrique et se comportent comme des cellules de tardigrade.
Cette découverte ouvre la voie à de nombreuses possibilités d’utilisation à l’échelle humaine et notamment dans la recherche sur le vieillissement cellulaire.
Autre piste à explorer en observant les cellules de cet animal : sa capacité à survivre à des conditions de rayonnement extrêmes sans que son ADN ne soit endommagé.
Même après un voyage dans l’espace ou après une exposition à des radiations, l’ADN du tardigrade ressort intact.
Comment ce miracle est-il possible alors qu’il subit des doses en rayons X ou Gamma respectivement 700 fois et 1000 fois supérieures aux doses mortelles pour l’homme ?
Les scientifiques ont détecté une autre protéine, qu’ils ont nommée Dsup pour Damage suppressor.
Lors d’un stress, la protéine Dsup entoure la chromatine, la structure dans laquelle l’ADN est empaqueté, réduisant ainsi de 40% les dommages de l’ADN causés par les rayons X et augmente sa radiorésistance.
Cette piste ouvre un nouvel axe de recherche dans les traitements contre le cancer.
Depuis sa découverte à la fin du XVIIIème siècle, les scientifiques vont donc de surprise en surprise.
Mesurant entre 0,1 et 1,2 mm, son corps est composé de 4 paires de pattes et de 2 yeux. Pourvu de muscles, de neurones, d’un intestin et d’un microbiome, il vit dans les interstices des sols, les sédiments, les mousses ou encore les milieux aquatiques.
Surnommé « Ourson d’eau » par Johann Goeze, qui le découvre en 1773, le tardigrade signifie littéralement « marcheur lent ». Son nom de baptême vient de l’abbé Spallanzani, passionné de microscopie, qui constate sa démarche débonnaire sous sa loupe.
Il vit aussi bien dans les abysses, à plus de 6000 mètres de profondeur, que sur les hauts sommets à 4600 mètres d’altitude.
Avec plus de 1300 espèces recensées, le tardigrade n’a pas encore fini de livrer tous ses secrets.
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Sources
Muséum National d’Histoire Naturelle https://www.mnhn.fr/fr
CNRS https://lejournal.cnrs.fr/articles/les-super-pouvoirs-du-tardigrade
Centre Scientifique de Monaco https://www.centrescientifique.mc/uploads/documents/fr_ChroniqueCSM514.pdf
Sciences et Avenir https://www.sciencesetavenir.fr/animaux/le-tardigrade-animal-presque-indestructible-pourrait-nous-donner-ses-superpouvoirs_177695
Sanchez-Martinez S, Nguyen K, Biswas S, Nicholson V, Romanyuk AV, Ramirez J, et al. Labile assembly of a tardigrade protein induces biostasis. Protein Science. 2024; 33(4):e4941.
https://doi.org/10.1002/pro.4941
Crédits Photo Tardigrade (water bear) par Rukanoga
Crédis Vidéo soil microbes, with bacteria, fungi, tardigrade and nematode on a regenerative farm par William
Crédits Illustration "Horizontal banner with glass model of molecule" Par frenta
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