Nous avons l’habitude de lire que l’Homme est un animal « à sang chaud », par opposition à un animal « à sang froid » comme le serpent.
Ce « cliché » est-il fondé ? Suivez-moi dans les mystères de notre chaufferie interne.
L’Être Humain a la capacité de conserver sa température interne constante, quelle que soit la température extérieure. C’est un organisme homéotherme.
De plus, en produisant sa propre chaleur, véhiculée par le sang, il est endotherme.
Par opposition à un organisme homéotherme, un organisme poïkilotherme voit lui sa température interne varier en fonction de la température extérieure.
C’est le cas du serpent qui est également un ectotherme, car il ne produit pas sa propre chaleur. Il la récupère via des échanges avec l’extérieur.
Historiquement évaluée à 37°C depuis le milieu du 19ème siècle, notre température corporelle normale est évaluée désormais entre 36,1°C et 37,8°C.
Pourquoi le corps a-t-il besoin d’être à cette température ?
Parce que c’est la température idéale pour assurer le fonctionnement optimum des réactions enzymatiques et des mécanismes intra-cellulaires .
Mais attention, la température n’est pas la même selon les parties du corps.
Par exemple les parties externes comme la peau oscillent entre 10°C et 40°C.
Le cerveau est quant à lui l’organe le plus chaud avec des températures en moyenne 2°C supérieures au reste du corps. Les chercheurs ont même enregistré des pics jusqu’à 41°C.
L’hypothèse pour expliquer cet écart est la suivante : étant l’ordinateur de bord du corps (appelé noyau central par les scientifiques), il est essentiel que sa température optimale soit respectée. En ayant une température de consigne supérieure à celle du reste du corps, il s’assure d’avoir toujours la priorité pour être bien au chaud.
En cas de surchauffe, le cerveau déclenche des bâillements. Vous avez maintenant un bon prétexte pour bâiller aux corneilles (sans en abuser).
Les températures corporelle et cérébrale ont certes des valeurs normatives mais elles évoluent légèrement sur 24h. Le pic se situe vers 17h et les valeurs sont au plus bas entre 3 et 5h du matin.
Notre thermomètre interne dépend également des variations physiologiques.
Chez la femme, la progestérone agit sur l’hypothalamus, notre thermostat interne. Ainsi on enregistre une élévation de la température corporelle lors du pic de progestérone lié à l’ovulation.
Le « remède de grand-mère » pour détecter le meilleur moment du cycle pour faire un bébé en suivant sa courbe de température est donc scientifiquement prouvé !
Enfin, la température corporelle varie avec l’âge.
Un nourrisson présente ainsi des difficultés à se thermoréguler du fait de l’immaturité de son système nerveux central.
Une personne âgée verra sa thermorégulation perdre en efficacité. Les causes principales découlent de nombreux facteurs comme la baisse de l’activité physique, la diminution du débit sanguin, le ralentissement de l’activité nerveuse sympathique.
Chez ces 2 populations sensibles, une vigilance accrue est essentielle lors des épisodes de grand froid ou de canicule pour éviter l’hypothermie ou l’hyperthermie.
C’est la capacité à réguler la température pour être toujours à la température idéale de fonctionnement.
Quelle que soit la température externe, la thermorégulation permet le retour à l’équilibre physiologique. Elle suit les principes de la thermodynamique, la science qui étudie les systèmes en équilibre notamment au niveau des échanges de chaleur.
Chez un organisme tel que l’Être humain, la thermorégulation repose sur un ensemble de réponses physiologiques. Son quartier général se situe dans le cerveau et plus précisément au niveau de l’hypothalamus, sur le pont 24h/24, 7 jours/7.
Il reçoit par les voies nerveuses afférentes les relevés de températures des différents thermorécepteurs disséminés dans le corps au niveau de la peau, du sang, du cerveau.
Une variation d’un degré Celsius déclenche le processus de rééquilibrage de la zone en déséquilibre thermique en commandant soit la thermogenèse (production de chaleur), soit la thermolyse (élimination de la chaleur), tout en respectant la température idéale spécifique à chaque zone.
En complément de la réponse physiologique, la régulation comportementale nous amène à nous vêtir ou à nous dévêtir.
Cette régulation est possible grâce à l’intéroception, ce sens qui nous permet de percevoir des stimuli à l’intérieur de notre corps et qui permet de nous maintenir en vie.
Mais revenons à la réponse physiologique. Lorsque l’hypothalamus perçoit un écart de température par rapport à la température de consigne, il commande le démarrage des mécanismes physiques permettant de refroidir ou réchauffer le corps.
💦 La transpiration
Pour évacuer la chaleur, l’hypothalamus stimule les glandes sudoripares qui produisent la sueur. Le corps élimine alors le trop plein de chaleur via l’eau de la transpiration, qui ensuite s’évapore.
🥵 La vasodilatation
En augmentant le diamètre des vaisseaux sanguins, on augmente les échanges de chaleur du sang vers l’extérieur. C’est pour ça qu’on devient rouge tomate pendant un effort physique par exemple.
⚡️ L’augmentation du métabolisme
Travaillant à une température avoisinant les 50°C, les mitochondries, nos centrales énergétiques cellulaires, sont une des principales sources de chaleur pour maintenir notre corps à 37°C.
⚡️ La contraction des muscles
En provoquant des frissons, les muscles produisent de la chaleur.
En faisant se dresser les poils sur la peau grâce aux muscles arrecteurs, on déclenche l’horripilation, la célèbre chair de poule. Le but est d’emprisonner de l’air entre les poils redressés mais pour l’Homo sapiens ce n’est plus d’aucune utilité vue notre faible pilosité. On a cependant gardé ce reflexe archaïque.
🩸 La vasoconstriction
En resserrant le diamètre des vaisseaux sanguins, la vasoconstriction concentre la circulation cutanée au niveau de l’hypoderme, la couche la plus profonde de la peau composée de tissu adipeux (graisseux) faisant office d’isolant.
On limite alors les pertes thermiques en surface en réduisant les échanges entre le sang et l’extérieur mais aussi en profondeur en limitant les échanges entre « le noyau central » et la peau.
Nous venons de voir que les mécanismes physiologiques déclenchés par l’hypothalamus permettent d’échanger la chaleur/le froid entre le corps et l’extérieur.
Ces échanges sont de 4 types.
C’est le transfert de chaleur entre 2 objets directement en contact. Par exemple la tasse de thé va réchauffer nos mains puis, puis une fois bue, la boisson chaude va réchauffer l’intérieur de notre tube digestif.
La vasodilatation va faciliter la conduction de la chaleur du corps vers l’extérieur alors que la vasoconstriction va la limiter.
En emprisonnant l’air entre les poils, les plumes ou des couches de vêtements, on crée une couche isolante qui tient chaud. C’est le principe exploité par la chair de poule même si ce n’est plus efficace chez l’Homme désormais imberbe et qui a recours aux vêtements pour se tenir chaud ou se réchauffer.
En hiver, multiplier les couches de vêtements est plus efficace que de mettre un seul gros pull chaud par exemple.
C’est l’échange de chaleur via les photons infra-rouges. Se chauffer aux rayons du soleil, devant un feu de cheminée suit le mécanisme de rayonnement.
C’est le transfert de la chaleur du corps vers l’extérieur par l’intermédiaire de la sueur qui, en s’évaporant, libère en dehors du corps la chaleur excédentaire.
Au quotidien on perd environ 500 ml d’eau via la perspiration cutanée.
Vous l’avez compris la thermorégulation est un processus essentiel à notre vie et repose sur des principes physiologiques pas du tout magiques mais thermodynamiques !
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Sources
CNRTL (Centre National de Ressources Textuelles et Lexicales)
The cellular coding of temperature in the mammalian cortex. M. Vestergaard, M. Carta, G. Güney & J. F. A. Poulet Nature. 2023 Feb 8. DOI:10.1038/s41586-023-05705-5.
Crédits Illustration "Horizontal banner with glass model of molecule" Par frenta
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